Le Laboratoire transports et environnement « met au banc » les gaz d'échappement
Le Laboratoire transports et environnement (LTE) mesure les émissions liées à la circulation automobile.
Le LTE, qui utilise un banc à rouleau comme celui des tests d'homologation, connaît bien la problématique des différentes mesures de polluants. Les chercheurs développent notamment des méthodes de mesure des polluants non réglementés, encore mal appréhendés malgré des impacts sanitaires avérés.
Outre le dioxyde de carbone (CO2), un des principaux gaz à effet de serre (à 34 % émis par les transports routiers en France), les véhicules rejettent bien d'autres polluants dont les effets sur la qualité de l'air sont tout aussi importants. L'équipe Énergie et Pollution de l'air mesure ces différentes émissions : les polluants réglementés (monoxyde de carbone, oxydes d'azote ou NOx, hydrocarbures, particules) sur les nouveaux modèles de véhicules ou ceux dont les émissions sont peu connues tels des engins de chantier, voiturettes sans permis ou deux-roues ; et, surtout, les polluants encore non réglementés.
Parmi ces derniers, certains sont classés cancérigènes par le Centre international de recherche sur le cancer (Circ), comme les hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP), le carbone suie - carbone sous forme de particules fines -, le formaldéhyde ou le benzène. D'autres, tels les composés organiques volatils, sont des précurseurs de polluants secondaires, comme l'ozone, produit par réaction chimique dans l'atmosphère. « Leurs effets sont d'autant plus importants à évaluer que ces émissions sont susceptibles d'augmenter, par exemple en condition d'écoconduite pour certains moteurs thermiques ou dans les véhicules hybrides, ajoute Serge Pélissier, directeur du LTE. Notre objectif est de connaître ces émissions pour tout type de véhicules.» Depuis cinq ans, l'équipe développe des méthodologies de mesure de polluants, par exemple pour les particules fines et ultrafines comme le carbone suie (en dessous de 1 µm de diamètre), le benzène, le toluène et autres BTEX, le formaldéhyde, l'acétaldéhyde, l'acétone, des HAP, etc. Elles pourraient contribuer, un jour, à de nouvelles réglementations.
Les chercheurs mènent ces travaux sur des véhicules qui peuvent aller jusqu'à 3,5 tonnes sur un banc à rouleau, une installation comparable à celle utilisée pour les tests d'homologation : cette dernière permet de reproduire en laboratoire le fonctionnement d'un véhicule en circulation, en entraînant avec les roues un rouleau freiné, le moteur étant refroidi grâce à une ventilation. Le conducteur reproduit des cycles ou trajets prédéfinis, urbains, routiers ou autoroutiers, pendant qu'un système de prélèvement distribue en continu les gaz d'échappement vers les différents analyseurs. « Nous nous servons des cycles de conduite de référence (NEDC, utilisés pour l'homologation des normes Euro) et des cycles plus réalistes, comme les cycles Artemis développés en 2002 par l'Ifsttar dans le cadre d'un projet de recherche européen, et largement utilisés depuis par les laboratoires et les constructeurs », explique Serge Pélissier.
Comme nous l'a rappelé l'actualité récente, les tests d'homologation, qui ont le mérite d'être reproductibles et de permettre des comparaisons, ne sont pas représentatifs. Depuis longtemps, des ONG alertent sur les surémissions constatées en condition réelle, qui n'ont fait que s'accroître au fur et à mesure que les normes se durcissaient. Les futurs tests sur route (RDE) de la réglementation européenne, prévus en 2017 pour les émissions de NOx, vont permettre d'obtenir des valeurs plus raisonnables, et donc de réduire plus efficacement les émissions des voitures. « Car, même si les mesures embarquées à bord de véhicules en condition de circulation réelle sont difficiles à mettre en oeuvre et à interpréter à cause des nombreux aléas de mesure (notamment de conditions de circulation et de conduite), ces tests complètent bien les mesures sur banc », reconnaît Serge Pélissier.