Le CIIRPO, laboratoire de la brebis innovante

Région Nouvelle-Aquitaine - 29/06/2018 14:15:00


Près de Limoges, le CIIRPO est lieu d'expérimentation unique pour la production ovine. Cet organisme interprofessionnel cherche à améliorer les techniques d'élevage, apporte son appui technique et diffuse l'information aux éleveurs.

Un lieu unique d'expérimentation
La belle ferme traditionnelle, appartenant à l'Institut de l'Elevage, domine la vallée de la Ligoure au sud de Limoges. Les bâtiments anciens accueillent le visiteur avec leurs toits de tuiles plates et murs de pierre épais. Les cinq bergeries ont été placées derrière. Leurs toits couverts de 700 m² de panneaux photovoltaïques produisent 4 fois plus d'énergie que la ferme n'en consomme. Tout autour, la forêt et les pâturages : plus de 100 hectares où pâturent les 750 brebis. Le CIIRPO est le lieu idéal pour les expérimentations grandeur nature.

Le centre fête cette année ses 15 ans. Il a été créé en 2003 à l'initiative des professionnels de la production ovine, de l'Institut de l'élevage ainsi que des « ex » Régions Limousin, Poitou-Charentes et Centre. Une soixantaine de structures, en majorité localisées dans la région Nouvelle-Aquitaine adhèrent à l'association : lycées agricoles, organisations de producteurs, chambres d'agriculture, syndicats ovins, groupements de défense sanitaire...


Diffuser la connaissance
« Notre vocation, c'est l'expérimentation et la diffusion des connaissances » explique Denis Gautier le directeur du CIIRPO. La plupart des études se font en collaboration avec les organismes adhérents, l'école vétérinaire de Toulouse, l'Inra ou des organismes internationaux. Le CIIRPO mène de front une quinzaine de projet par an, en grande partie en réponse à des appels à projets. En parallèle, il produit une littérature abondante, lettres d'information et fiches techniques, prodigue des conseils aux éleveurs, fournit des articles à la presse hebdomadaire. Sa chronique ovine s'arrache dans 40 éditions départementales de la France Agricole. « C'est super parce que ça fait parler du mouton ! » se félicite Denis Gautier. A cela se rajoutent podcasts, vidéos et journées d'informations dans les lycées. Plus de 1000 personnes passent chaque année sur la ferme du CIIRPO. « Nous recevons chaque année de plus en plus de public. Tout le lieu est un formidable espace pédagogique pour les éleveurs, les conseillers agricoles, les chercheurs, les stagiaires...et bien sûr les élèves des lycées. ».

Une nouvelle bergerie, à la fois originale et reproductible, a été inaugurée en 2017 avec pour objectifs d'améliorer les conditions de travail de l'éleveur et le bien-être animal. Elle est dotée d'un plateau sur roulettes à hauteur d'homme pour éviter les manutentions lourdes à l'éleveur. Au sol, un paillis de bois déchiqueté est en test. Cette expérimentation sur l'agroforesterie, ou comment utiliser au mieux les ressources de la forêt pour son élevage, est en cours. Les premiers résultats montrent que les animaux n'y perdent pas en confort par rapport à une litière en paille. Dans la bergerie voisine, encadrés par Sophie Lugagne, technicienne ovine, des stagiaires effectuent une pesée pour suivre l'évolution des animaux.


Susciter des vocations
A l'étage de la grange principale, les panneaux détaillent les quelques expérimentations marquantes des dernières années « Nous essayons de susciter des vocations en montrant que le métier d'éleveur ovin est devenu très moderne et pas aussi demandeur en temps de travail qu'on l'imagine » rappelle Denis Gautier. « Lorsqu'on montre à un lycéen que le smartphone va devenir indispensable dans la gestion de l'exploitation, il est au minimum intrigué. Applis et nouvelles technologies permettent d'améliorer vraiment les temps de travail. » Le smartphone peut par exemple avertir lorsqu'un groupe de brebis perd du poids, signe d'une possible infestation par des parasites intestinaux.

Un des axes importants du travail du CIIRPO est le développement de nouvelles technologies numériques pour faciliter le travail de l'éleveur et améliorer la performance des exploitations. Une autre expérimentation est en projet qui mise sur des capteurs qui suivent le comportement des animaux. Par exemple, pendant les agnelages, pour détecter des comportements anormaux et permettre à l'éleveur d'être présent au bon moment. Un autre projet devrait voir le jour avec l'autopesée. Les cages de pesée permettent aux brebis de se peser toute seule ce qui permettrait de mieux en suivre l'évolution. « C'est très pratique pour des animaux qui sont dans des parcelles éloignées. Cela permet de suivre un lot ou un animal et de constituer une base de données de suivi des animaux et de détecter les problèmes sanitaires. » Quant aux herbomètres électroniques, ils permettent de calculer la quantité d'herbe disponible d'une parcelle. L'éleveur sait alors combien il peut laisser de brebis sur le pâturage en fonction de la quantité d'herbe disponible.


Le label Digiferme
Enfin, le CIIRPO est en train d'étudier le développement d'un pistolet automatique pour traiter l'animal à son juste poids. Cet outil n'existe pas en France à ce jour. Les objectifs et intérêts de cet outil sont de plusieurs ordres : réaliser des économies importantes de produits antiparasitaires grâce à une gestion des doses à l'individu, diminuer les rejets chimiques dans les sols, limiter les résistances des animaux à certaines molécules dues au surdosage ou encore faciliter le travail de l'éleveur.

Rien d'étonnant à ce que la structure ait obtenu le label Digiferme®, un dispositif national d'expérimentation de plein champ des technologies numériques.


Le soutien régional
La Région soutient le CIIRPO. Lors de la commission permanente du 23 avril 2018, elle a voté une aide de 112 157 euros pour le projet Paralut mené avec les coopératives CDEO et GEOD. Le projet explore la voie des Alicaments (aliments qui soignent ou avec un intérêt sanitaire) pour lutter contre les strongles (parasites intestinaux des ovins). En parallèle, le projet s'intéresse à la voie génétique en testant une souche de béliers résistante naturellement à l'infestation.

Lors de la commission permanente du 28 mai, la Région a également voté une aide de 28 238 euros pour un projet de test de solutions innovantes pour optimiser l'autonomie alimentaire, anticiper les aléas climatiques et réduire l'utilisation des traitements antiparasitaires.