Communiqué de presse : Transition énergétique : faut-il exploiter les ressources des sous-sols français ?

Académie des Sciences - 18/07/2018 19:10:00


L'Académie des sciences et l'Académie des technologies viennent d'émettre un rapport commun visant, dans le cadre de la transition énergétique, à conseiller les pouvoirs publics dans la perspective d'une exploitation éventuelle des sous-sols terrestre et marin français, métropolitains ou ultramarins, en matériaux rares : le potentiel français dans ce domaine pourrait ne pas être négligeable. Dressant un bilan des besoins en ces matériaux liés au programme énergétique de la France, les deux académies considèrent que le risque de pénurie à l'échelle mondiale est faible au XXIe siècle, malgré l'importance de la demande. Elles insistent cependant sur la nécessité d'envisager une éventuelle stratégie d'exploitation minière en France en l'inscrivant dans une perspective à l'échelle mondiale, incluant notamment des choix politiques pour l'industrie énergétique française, qui devrait en tirer avantage. Elles insistent en outre sur l'impérative nécessité d'adapter cette stratégie à l'évolution permanente des technologies du secteur.

Le délicat virage de la transition énergétique, qui devrait voir les industries des hydrocarbures et du charbon faire place à d'autres, non productrices de gaz à effet de serre, soulève des questions, notamment quant au recours aux matières premières que nécessitera la construction des nouvelles installations productrices d'énergie. Qu'ils soient traditionnels (fer, béton, cuivre, etc) ou jusqu'ici peu utilisés (métaux rares, dont terres rares pour les aimants des éoliennes, vanadium, rhénium pour la catalyse, lithium pour le stockage par les batteries, etc), la demande pour ces matériaux augmente d'ores et déjà fortement à l'échelle mondiale, pour les pays développés comme en développement. Or, de nombreuses incertitudes accompagnent la question de leur exploitation ou de leur recyclage : risques d'instabilité des cours, de monopoles de certains producteurs, ou encore d'exploitations minières mal maîtrisées dans certains pays, avec des conséquences inacceptables pour l'environnement mondial et la santé...

Afin de conseiller les pouvoirs publics en cette période charnière, l'Académie des sciences et l'Académie des technologies viennent de publier un rapport commun estimant les besoins français en métaux et matériaux nécessaires à la production, à l'utilisation et au stockage de l'énergie, pour réaliser les objectifs énergétiques des scénarios définis par le gouvernement à horizon 2050. Cette estimation est fournie tant en termes de quantité que de prix aux cours actuels. Ces chiffres mettent en évidence l'importance considérable de ces enjeux pour la France.

Si, à l'échelle de la planète, les estimations des ressources par les experts se veulent rassurantes, les deux académies considèrent que le sous-sol de la France métropolitaine et d'outre-mer, tant terrestre que sous-marin, est susceptible de contenir des quantités très significatives de tels métaux et matériaux, capables d'assurer une certaine indépendance de la France vis-à-vis des producteurs dominants. Elles recommandent donc l'établissement d'une cartographie complète de ces ressources, et soulignent la nécessité de définir, en préalable à toute exploitation minière possible, des stratégies industrielles au cas par cas, afin que la France puisse tirer un avantage économique de son engagement dans la transition énergétique. Ces choix devraient ainsi prendre en compte les considérations économiques et de politiques industrielles pour que la place de l'industrie énergétique française de production d'équipements se développe, en regard notamment des autres acteurs sur le plan mondial

Enfin, pour les deux académies, cette transition industrielle ne pourrait se réaliser efficacement à long terme qu'en s'accompagnant d'une recherche et d'une veille prospective de ce secteur, en constante évolution. Cette veille pourrait notamment s'appuyer sur l'expertise de l'Alliance nationale de coordination de la recherche pour l'énergie (Ancre).