Espace permanent du CNCS: Collection Noureev

CNCS - Centre National du Costume de Scène - 18/02/2019 11:50:00

Musée unique au monde et lieu de conservation majeur dans le domaine des arts du spectacle, le Centre national du costume de scène est maintenant ouvert toute l'année grâce à son espace d'exposition permanente consacré à Rudolf Noureev, l'un des plus grands danseurs du XXe siècle. La Collection de cette Étoile de la danse russe qui choisit la liberté à Paris, présente des aspects de la vie personnelle et artistique de cet artiste à la carrière internationale exceptionnelle.

Dans une scénographie théâtralisée, conçue par Ezio Frigerio assisté de Giuliano Spinelli, une centaine de pièces - mobilier, instruments de musique, textiles, tableaux, gravures, sculptures, costumes de ville et de scène, photographies et films - évoqueront à la fois la vie artistique de Rudolf Noureev et son esthétique personnelle :

- Des éléments de sa biographie, son enfance en URSS, son passage à l'ouest, sa vie publique ;
- Sa carrière exceptionnelle, comme danseur: son parcours professionnel depuis sa jeunesse et sa formation à l'École de danse du Kirov à Leningrad, jusqu'à sa trajectoire de danseur étoile, en France et en Angleterre, puis rapidement de star, acclamé sur les scènes du monde entier;
- Son travail de chorégraphe, notamment sa réinterprétation de grands ballets classiques du XIXe siècle, pour certains inconnus en Occident. En tout plus de 14 chorégraphies évoluant dans des décors et des costumes opulents, dessinés par des grands artistes de la mode et de la scène (Georgiadis, Frigerio, Kamer, Hanae Mori...);
- Des éléments de sa biographie, son enfance, son passage à l'ouest, sa vie publique ;
- Son cadre de vie, son goût pour les décors et les intérieurs opulents, sa manière personnelle de collectionner (objets, mobilier et textiles), sa passion pour la musique...


Parcours d'un danseur d'exception

Un premier espace présente la carrière internationale exceptionnelle du danseur comme du chorégraphe au travers de deux vitrines consacrées aux costumes de ballet de Noureev et de ses partenaires. Pour des raisons de conservation, les costumes de la Collection seront exposés par roulement, changeant tous les six mois.

La première vitrine dévoile quelques-uns des costumes de scène les plus significatifs de la carrière de Noureev comme, par exemple, le pourpoint pour le rôle du Prince dans le pas de deux de Casse-Noisette (1962) qui est l'un des premiers costumes portés par Noureev après sa défection, celui dessiné par Ezio Frigerio pour le rôle de Roméo dans Roméo et Juliette (1977, London Festival Ballet) d'inspiration italienne, ou encore celui pour le rôle de Jean de Brienne pour l'acte III de Raymonda (1983, Opéra de Paris) conçu par Nicholas Georgiadis, autant de traces matérielles de ses performances scéniques... Cette vitrine met en évidence le parcours remarquable du danseur et souligne son apport essentiel au ballet classique, aussi bien d'un point de vue vestimentaire que chorégraphique. En effet, dès ses premières apparitions scéniques, Noureev abandonne la culotte, ne gardant que les collants, et modifie ses pourpoints. Au fur et à mesure des années, il les raccourcit et les cintre à la taille, en dégage l'encolure et en remonte les manches.

Côté scène, Noureev intensifie des rôles masculins qu'il danse lui-même, les enrichissant de difficultés techniques. Chorégraphe prolifique, il monte pas moins de quatorze productions, parfois jusque-là inconnues en Occident, qui sont dansées par les compagnies les plus prestigieuses, du Royal Ballet de Londres à l'Opéra de Paris, en passant par la Scala de Milan ou l'Australian Ballet. Ainsi, la seconde vitrine présente des costumes dessinés pour les chorégraphies de Noureev et portés par ses partenaires. Sont entre autres exposés des costumes de Sylvie Guillem, Noëlla Pontois ou Laurent Hilaire signés Hanae Mori ou Franca Squarciapino pour les ballets Cendrillon (1986), Le Lac des cygnes (1984) ou La Bayadère (1992) chorégraphiés par Noureev et présentés à l'Opéra de Paris. Des reproductions de maquettes de décor ainsi qu'un auditorium, où sont projetés un documentaire retraçant la carrière du danseur et de nombreux extraits de danse, permettent de remettre en contexte certains de ces costumes et de retrouver l'ambiance générale de chaque ballet.


Eléments biographiques

Après cette immersion dans la carrière de Rudolf Noureev, l'exposition se poursuit dans la salle suivante par un accrochage de photographies personnelles illustrant sa jeunesse à

Oufa et sa formation à l'école de danse Vaganova à Leningrad, ses premiers pas en tant que soliste du Ballet du Kirov (19581961) jusqu'à sa défection en 1961. En face, une frise chronologique met en regard des dates marquantes de la vie de Rudolf Noureev et des évènements historiques, politiques et culturels de la seconde moitié du XXe siècle. Une borne interactive présentant l'ensemble de la Collection en ligne ainsi que des informations complémentaires sera mise à disposition en consultation libre.


Parcours d'un collectionneur

La troisième et dernière salle plonge le visiteur dans la vie intime de Noureev. Gravures, peintures, mobilier, instruments de musiques, textiles et vêtements historiques ou orientaux sont ici exposés, traces matérielles de la vie, avant tout nomade, du danseur. Loin des projecteurs, à l'abri de ses nombreuses retraites - Paris, New York, Saint-Barthélemy... - Rudolf Noureev amasse par centaines d'incroyables collections d'effets personnels et d'oeuvres d'art et les affiche avec un goût inné de la mise en scène. Aujourd'hui dévoilées au public, elles témoignent de l'esthétique personnelle extraordinaire de cet homme.

Appartement quai Voltaire
La mise en scène conçue par Ezio Frigerio permet de pénétrer dans l'univers de Noureev grâce à la reconstitution d'une partie du séjour de l'appartement au 23 quai Voltaire, à Paris, que le danseur achète en 1979. Composé de tableaux qui tapissaient les murs du salon parisien, de pièces de mobilier dont une banquette et un guéridon en bois de Carélie, et un canapé, de son porte-manteau et de nombreux objets divers, cet espace imaginé comme une « period room » a pour vocation de faire revivre dans leur contexte ces différents éléments provenant des appartements de Paris et de New York. Cette immersion au coeur de de la vie quotidienne du danseur est l'occasion pour le public de juger des liens entre les créations artistiques de l'homme et son esthétique de vie personnelle.

Gravures et estampes
La Collection comprend plus d'une centaine d'items dont douze gravures de décors de théâtre de Burnacini (1636-1707), vingt-cinq de Coypel (1694-1752) sur l'histoire de Don Quichotte et quatre gravures sur bois japonaises. Cette abondance témoigne du goût très prononcé que Noureev avait pour les gravures. Les murs de sa chambre à Paris étaient tapissés de gravures datant du XVIe à la première moitié du XVIIIe siècle, représentant des monuments d'architecture, que ce soit des cathédrales ou le panorama de grandes villes européennes - Paris, Amsterdam, Londres, Rome, Vérone, Florence - et de son pays natal.

Textiles
On retrouve la trace de la passion du danseur pour les textiles orientaux avec une pièce en laine de sa colossale collection de kilims, ou encore avec de superbes kimonos japonais qu'il portait dans l'intimité, lors de soirées privées. Des pièces hautes en couleur de son vestiaire de ville font également parties de la Collection : une veste ajustée en cuir doré emblématique de la « peacock revolution » qui touche la mode masculine à Londres dans les années 1960, un châle multicolore griffé Kenzo, un habit queue-de-pie de chez Anderson and Sheppard...

Instruments de musique
Passionné de musique, Noureev envisage à la fin des années 1980, alors qu'il est déjà malade, une carrière de chef d'orchestre. Cette dernière est encouragée par trois des plus merveilleux chefs du XXe siècle : Karl Böhm, Herbert von Karajan et Leonard Bernstein. Il s'engage dans cette nouvelle voie avec le même acharnement qu'on lui connut pour la danse. Cette partie de sa vie est retracée grâce à la présence de sa baguette de chef, de son métronome, d'un harmonium Hofberg du xxe siècle et d'une épinette (un genre de petit clavecin) en noyer de facture anglaise datant du début du XVIIIe siècle.

Et aussi...
Cette dernière salle abrite également la maquette du tombeau de Noureev imaginé par son ami Ezio Frigerio. Composé de milliers de mosaïques, il représente un kilim, ultime hommage à l'Orient dont Noureev était originaire, placé au-dessus des malles de l'errance, évocation de sa vie de nomade et de son sentiment d'apatride. Cette vie faite de voyages est également matérialisée grâce à la présentation de ses passeports autrichiens, de son sac de voyage et de nombreux objets que Noureev dénichait lors de ces promenades à travers le monde.