Décisions de la Suisse concernant d'anciens et d'actuels stocks de l'armée ainsi que des transactions de matériel de guerre liées à la guerre en Ukraine

Conseil Fédéral de la République Helvétique - 07/06/2022 17:05:00

Décisions concernant le matériel provenant d'anciens et d'actuels stocks de l'armée
Berne, 03.06.2022 - L'Allemagne et la Pologne ont adressé au DDPS des demandes de transmission de matériel provenant d'anciens stocks ou de stocks actuels de l'armée. Le DDPS a décidé de la réponse à donner à ces demandes. L'Allemagne peut disposer librement des chars Leopard 2 déjà revendus à l'entreprise Rheinmetall il y a douze ans, car il n'y a plus de contraintes dans ce domaine. Par contre, les chars Leopard 2 désaffectés ne seront pas remis à la Pologne ; il faudrait pour cela une mise hors service et donc une décision du Parlement. En outre, la Suisse cédera à la Grande-Bretagne une partie d'une première livraison d'armes antichars qu'elle avait commandées à l'entreprise suédoise Saab AB. Comme prévu, la majeure partie des systèmes commandés sera livrée à la Suisse d'ici le début 2023.

Ces dernières semaines, des États européens ont adressé des demandes à la Suisse concernant la livraison de matériel de guerre. Il s'agit notamment de permettre à des pays de reconstituer leurs propres stocks après avoir mis des systèmes militaires à la disposition de l'Ukraine. Les demandes de transfert de matériel excédentaire provenant d'anciens stocks ou des stocks actuels de l'armée et qui n'est plus nécessaire relèvent de la compétence du DDPS, tout comme les livraisons prévues de systèmes commandés. L'aliénation de matériel excédentaire de l'armée ne relève pas de la loi sur le matériel de guerre.

L'Allemagne peut disposer librement des chars Leopard 2 qui ont été revendus
En raison de la guerre en Ukraine, l'Allemagne a l'intention de mettre de grands systèmes militaires à la disposition de différents États européens. Elle recherche donc, entre autres, des chars de combat de type Leopard 2 A4 issus de l'industrie. Entre décembre 2010 et mai 2011, armasuisse avait revendu 42 de ces engins mis hors service au fabricant d'origine Rheinmetall Landsysteme GmbH à Kiel. Le canon de 120 mm, l'installation de lancement multiple, les mitrailleuses, l'installation de communication de bord ainsi que d'autres pièces d'équipement avaient alors été démontés pour tous les véhicules. Ces éléments sont restés en Suisse pour servir de pièces de rechange pour les chars Leopard restants.

Le DDPS a confirmé à l'Allemagne que l'utilisation ultérieure des chars vendus il y a douze ans déjà relève de la seule responsabilité de Rheinmetall et est donc soumise à la législation allemande sur l'exportation de matériel de guerre. L'Allemagne peut ainsi décider librement de l'utilisation ultérieure de ces véhicules.

Pas de transfert de chars Leopard 2 désaffectés à la Pologne
Une demande du gouvernement polonais a également été examinée. La Pologne s'intéresse aux chars désaffectés de type Leopard 2 A4 de l'Armée suisse. La Pologne motive cette demande par le fait qu'elle a livré des armes en quantité substantielle à l'Ukraine, y compris des moyens lourds, et qu'elle a donc maintenant besoin de moyens pour reconstituer ses propres stocks et capacités de défense.

Étant donné que l'aliénation de chars désaffectés à un autre État suppose en amont une mise hors service de ces systèmes, étape soumise à l'approbation du Parlement dans le cadre de messages sur l'armée, le DDPS estime que, dans les circonstances actuelles, l'aliénation de chars désaffectés à la Pologne ne peut pas être réalisée dans un délai utile.


Ukraine : le Conseil fédéral a statué sur plusieurs transactions de matériel de guerre
Berne, 03.06.2022 - Le 3 juin 2022, le Conseil fédéral a statué sur la question de la transmission de matériel de guerre suisse par des États tiers à l'Ukraine et de l'exportation de matériel de guerre livré sous forme d'éléments d'assemblage et de pièces détachées à des entreprises d'armement européennes. Les critères applicables aux exportations définis dans la loi fédérale sur le matériel de guerre et l'égalité de traitement découlant du droit de la neutralité ne permettent pas à la Suisse d'approuver une demande de transmission de matériel de guerre de provenance suisse à l'Ukraine. La livraison de matériel de guerre sous forme d'éléments d'assemblage ou de pièces détachées à des entreprises d'armement européennes restera cependant possible, même si le matériel de guerre fabriqué est susceptible d'être envoyé en Ukraine.

La Suisse a reçu de l'Allemagne et du Danemark des demandes de transmission de matériel de guerre à l'Ukraine. La demande de l'Allemagne concerne environ 12 400 munitions de 35 mm de fabrication suisse pour des chars antiaériens de type Gepard ainsi que pour des chars de grenadiers à roues Piranha III achetés initialement par le Danemark et stationnés en Allemagne depuis leur retrait de service. La demande du Danemark, quant à elle, porte sur 22 chars de grenadiers à roues Piranha III produits en Suisse.

Selon la loi fédérale sur le matériel de guerre (LFMG), les exportations de matériel de guerre doivent être refusées si le pays de destination est impliqué dans un conflit armé international. Or la Russie et l'Ukraine sont impliquées dans un tel conflit. Comme les exportations de matériel de guerre de provenance suisse à destination de l'Ukraine ne peuvent être autorisées en raison de l'égalité de traitement découlant du droit de la neutralité et des dispositions de la LFMG, il n'est pas possible de répondre favorablement aux demandes de l'Allemagne et du Danemark en vue de la transmission de matériel de guerre à l'Ukraine.

Les livraisons de matériel de guerre à des entreprises d'armement européennes restent possibles

Le Conseil fédéral a étudié deux demandes d'exportation de matériel de guerre déposées par des entreprises suisses portant sur la livraison de matériel sous forme de pièces détachées et d'éléments d'assemblage à des entreprises d'armement en Allemagne et en Italie. Il s'agit, pour une des demandes, de composants de lance-roquettes antichar et, pour l'autre, de composants destinés à la défense aérienne. Les deux transactions présentent le risque que certains des composants soient utilisés dans du matériel de guerre livré ensuite à l'Ukraine. La LFMG permet aux entreprises suisses de participer aux chaînes de valeur internationales de l'industrie d'armement. Dans le cadre de la pratique actuelle du Conseil fédéral, les livraisons de matériel de guerre sous forme de pièces détachées et d'éléments d'assemblage sont en principe autorisées, sous réserve que leur part dans le produit final soit inférieure à un certain seuil de valeur (50 % pour les pays comme l'Italie et l'Allemagne).

Le Conseil fédéral a décidé de poursuivre cette pratique, étant donné que de telles exportations sont compatibles avec le droit de la neutralité.