Protection des minorités nationales : publication de nouveaux avis sur l'Arménie et l'Italie

Conseil de l'Europe - 14/02/2023 13:15:00

Le Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales a publié deux nouveaux avis.

La société arménienne se caractérise par un climat de tolérance et de compréhension mutuelle, avec de nombreux programmes diffusés dans les langues minoritaires et consacrés aux minorités nationales dans l'audiovisuel public. Les mesures en faveur des droits, des cultures et des identités des minorités nationales ne sont toutefois pas suffisantes ; les avancées législatives sont limitées et les modifications de la législation restreignant la liberté d'expression sont préoccupantes. Les autorités devraient intensifier leurs efforts pour améliorer la sombre réalité des filles yézidies qui subissent des mariages précoces et forcés et présentent des taux disproportionnés de décrochage scolaire. Ce sont là quelques-unes des principales observations et recommandations figurant dans le nouvel avis du Comité consultatif sur l'Arménie. L'avis est fondé sur les informations communiquées par des sources gouvernementales et non gouvernementales, notamment celles obtenues lors de la visite du Comité en Arménie en février 2022. L'avis publié est accompagné des commentaires des autorités.

L'Italie devrait prendre toutes les mesures nécessaires pour protéger les Roms et les Sintés, de l'avis du Comité. Malgré plusieurs initiatives parlementaires, aucun cadre législatif national portant spécifiquement sur la protection des Roms et des Sintés n'a été adopté. Les efforts faits par les autorités et les investissements réalisés au titre de la Stratégie nationale 2012-2020 d'inclusion des Roms, des Sintés et des Caminanti ne se sont pas toujours traduits par des améliorations notables des conditions de vie de ces communautés, de leur inclusion sociale et de leur accès aux droits et services. La consultation de leurs représentants et de leurs associations s'est toutefois améliorée. Le Comité demande que l'enseignement dans les langues des minorités continue d'être soutenu, que les minorités aient plus largement accès aux émissions de radio et aux programmes de télévision dans leur langue et que la société en général soit davantage sensibilisée à leur culture. L'avis repose sur les informations communiquées par des sources gouvernementales et non gouvernementales, notamment celles obtenues lors de la visite du Comité en Italie en novembre 2021. L'avis publié est accompagné des commentaires des autorités en anglais et en italien.

PLUS D'INFO
ARMENIE
Communication

Réf. DC 025(2023)

Minorités nationales en Arménie : un climat de tolérance prévaut dans le pays, mais il faut protéger la liberté d'expression, prévenir les mariages précoces et forcés, et améliorer l'éducation

Strasbourg, 13.02.2023 - La société arménienne se caractérise par un climat de tolérance et de compréhension mutuelle, avec de nombreux programmes diffusés dans les langues minoritaires et consacrés aux minorités nationales dans l'audiovisuel public. Malgré tout, les mesures en faveur des droits, de la culture et de l'identité des minorités nationales ne sont pas suffisantes ; les avancées législatives sont limitées et les modifications de la législation restreignant la liberté d'expression sont préoccupantes. Les autorités devraient intensifier leurs efforts pour améliorer la situation alarmante des filles yézidies, qui subissent des mariages précoces et forcés et présentent des taux disproportionnés de décrochage scolaire. Ce sont là quelques-unes des principales observations et recommandations figurant dans le nouvel avis publié aujourd'hui par le Comité consultatif de la Convention-cadre du Conseil de l'Europe pour la protection des minorités nationales. Un résumé du cinquième avis est également disponible en arménien.

En République d'Arménie, les minorités nationales sont les Allemands, les Assyriens, les Biélorusses, les Géorgiens, les Grecs, les Juifs, les Kurdes, les Polonais, les Russes, les Ukrainiens et les Yézidis.

Ces cinq dernières années, la pandémie de covid-19 et le conflit sur le Haut-Karabakh en 2020 ont contribué à un certain immobilisme en matière de protection des minorités nationales.

Il est à noter que depuis 2020, date à laquelle la loi martiale a été instituée, un certain nombre de modifications législatives sont venues restreindre le droit à la liberté d'expression. Dans ce contexte, les poursuites pénales engagées en octobre 2021 contre le directeur du Centre yézidi pour les droits de l'homme sont inquiétantes, car elles risquent d'avoir des effets en cascade sur la liberté d'expression des personnes appartenant à des minorités nationales et de la société civile. Le Comité estime que cette situation appelle une action urgente.

Le Comité consultatif déplore également que les autorités consacrent trop peu d'efforts aux problèmes concernant la minorité yézidie et tendent à considérer ces problèmes comme des normes sociales ou culturelles qui ne sont pas du ressort de l'État. Les taux élevés de décrochage scolaire chez les Yézidis, en particulier chez les filles, plus nombreuses que les garçons à abandonner leur scolarité, sont préoccupants. En outre, compte tenu notamment des déficiences des infrastructures de transport dans les communes rurales, le risque et la peur d'être victime d'un enlèvement sur le chemin de l'école accentuent le décrochage scolaire des filles yézidies.

Le mariage précoce et forcé des filles yézidies demeure un sujet de préoccupation en Arménie, et les représentants de la minorité yézidie ont eux-mêmes porté ce problème à l'attention du Comité consultatif, ce qui est louable. Pour le Comité, les autorités doivent faire davantage pour lutter contre ces pratiques. Le Comité consultatif exhorte d'ailleurs les autorités à recueillir des données sur les violences fondées sur le genre commises contre des femmes et des enfants appartenant à des minorités nationales, y compris sur les mariages précoces et forcés, et à concevoir d'amples politiques pour lutter contre les facteurs sociaux, économiques et culturels qui favorisent ces mariages.

Il existe un bon niveau de soutien financier aux manifestations culturelles et aux publications des minorités nationales, ainsi qu'une quantité satisfaisante de programmes dans les langues minoritaires à la radio et à la télévision publiques. Néanmoins, la perception stéréotypée ou folklorique des minorités est un frein à un véritable dialogue interculturel, à l'inclusion et à la participation politique. Les minorités nationales d'un moindre poids numérique courent un risque d'assimilation à l'avenir, faute de soutien à leur culture et à leur langue. Les programmes scolaires contiennent très peu d'informations sur les minorités nationales ; la seule possibilité de recevoir une éducation interculturelle est de suivre des cours avec des minorités. Le Comité consultatif exhorte les autorités à faire en sorte que l'information sur la culture, les traditions, l'histoire, les religions et les langues des minorités nationales et sur leur contribution à la société figure dans les programmes scolaires. Cela pourrait également aider à réduire le décrochage scolaire. L'offre pédagogique pour les minorités nationales, qui passe notamment par des enseignants convenablement formés et des supports d'apprentissage suffisants en langues minoritaires, devrait également être étoffée et améliorée.

Il n'existe pas de législation complète sur les minorités nationales en Arménie. Un projet de loi a été préparé en 2016, mais n'a pas été adopté. Le Comité regrette que ce processus ait abouti à une impasse. Il exhorte les autorités à réviser le projet de loi sur les minorités nationales, en veillant à ce que toutes les parties concernées soient effectivement consultées sur sa teneur. Les autorités devraient poursuivre sur cette base le processus d'adoption du texte, estime le Comité.

Le Conseil des minorités nationales reste le canal de dialogue officiel entre les représentants des minorités nationales et les autorités. Les critères d'éligibilité peuvent exclure toute minorité ayant récemment demandé à être reconnue, et le Comité appelle à assouplir ces conditions. En outre, l'absence de consultation sur la réforme administrative et territoriale est inquiétante. Le Comité consultatif juge essentiel que les minorités nationales soient effectivement consultées lorsque se prennent de telles décisions.

Le cinquième avis du Comité consultatif de la Convention-cadre pour la protection des minorités nationales se fonde sur les informations fournies par des sources gouvernementales et non gouvernementales, y compris celles obtenues lors de sa visite en Arménie en février 2022.

L'avis a été publié accompagné des commentaires des autorités.

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La Convention-cadre pour la protection des minorités nationales est le traité européen le plus complet en matière de protection des droits des personnes appartenant à des minorités nationales. Il s'agit du premier instrument multilatéral juridiquement contraignant consacré à la protection des minorités nationales dans le monde. Sa mise en oeuvre fait l'objet d'un suivi, assuré par un Comité consultatif composé d'experts indépendants. Entré en vigueur le 1er février 1998, le traité est maintenant en vigueur dans 39 États.


ITALIE
Communication
Ref. DC 026(2023)

Protection of National Minorities: Italy should pay more attention to numerically smaller linguistic minorities and strengthen the protection of Roma and Sinti

Strasbourg, 13.02.2023 - Italy should take all steps for the protection of Roma and Sinti, according to the opinion published today by the Advisory Committee on the Framework Convention for the Protection of National Minorities. Despite several parliamentary initiatives, no specific national legislative framework for the protection of Roma and Sinti has been adopted. The authorities' efforts and investments under the National Roma, Sinti and Caminanti Inclusion Strategy 2012-2020 did not always concretise in major improvements in the living conditions, social inclusion and access to rights and services of these communities. Consultation with representatives and associations has, however, improved.

Italy continues to apply the provisions of the Convention to twelve officially recognised "historical linguistic minorities". Within the decentralised structure of the Italian Republic minority rights are protected and implemented in a very asymmetric way within the national territory and not all minorities have benefited on an equal basis from the rights laid down in the treaty. The protection of rights guaranteed under the State Law No. 482/1999 on Protection of Historic Linguistic Minorities is further strengthened in some regions such as Aosta Valley, Friuli-Venezia Giulia and Trentino-South Tyrol, by the statutes of autonomy and other national and regional legislation.

Teaching in and of minority languages remains asymmetric throughout the country with, on the one hand, strong regulations and specific provisions in autonomous provinces and regions and, on the other hand, support for minority language education provided via project based. Due to the territoriality of applicable legislation, and thus funding, numerically smaller minorities face great difficulties in having access to education in their own language, notably in case of school closure in their traditional area of settlement. Efforts should be made to ensure continuous access, in rural or mountainous areas, to teaching in minority languages. Additionally, the lack of trained and certified teachers in and of minority languages has a negative impact on the availability of minority language education. Further support for universities or language centres providing teacher training courses and minority language certification is needed and incentives for the recruitment of minority language teachers should be provided. The newly established "Network of Schools with Minority language", is a welcomed development to allow exchange of good practices, teacher training and minority language educational material, worth further supporting.

The Committee urges the authorities to improve the efficiency of the mechanism for the support to minority languages and cultures by inter alia adapting the legislation to linguistic minorities' priorities, including those of numerically smaller ones, and simplifying grant procedures to access funding and making it more sustainable.

Financial support has been further provided at various levels for the preservation and development of minority cultures and languages. However, the legislation does not meet all expectations and its full potential due to its administrative burdens. Annual grants are disbursed sometimes with delay which makes it impossible in practice for minority organisations to plan and implement agreed activities. Gaps in funding for linguistic helpdesks have been observed. Inconsistent practices regarding the use of budget earmarked for linguistic minorities has also been noted. The ratification process of the European Charter for Regional or Minority Languages has still not been completed.

Moreover, the report underlines the need to increase access for persons belonging to linguistic minorities to radio and television programmes (including news ones) in their respective minority language and to ensure that digital solutions, as well as future RAI (Italian national radio and TV) Service Contracts, are developed in close consultation with minority representatives. Italy should also ensure the effective representation of persons belonging to linguistic minorities in any media monitoring mechanisms, including on the "Steering and Monitoring Committee".

Finally, a general climate of openness and mutual respect prevails in Italian society towards persons belonging to recognised, long-established linguistic minorities. Nevertheless, more could be achieved to increase knowledge among the broader population and pupils about the respective culture, language, history and other features of linguistic minorities, as well as of Roma and Sinti communities and religious groups.

Over recent years, an increased focus on combating antisemitism and anti-Muslim hatred in society has been noted, including at parliamentary level. There is, however, a need to increase awareness about and trust in institutions addressing racially motivated offences so as to address under-reporting of hate crimes and hate speech among those groups. Furthermore, the level of antigypsyism in society persists at all levels and is insufficiently addressed. The negative portrayal of Roma and Sinti remains widespread in the general perception in Italy, including on social media.

The Fifth Opinion of the Advisory Committee on the Framework Convention for the Protection of National Minorities is based on the information provided by governmental and non-governmental sources, including that obtained during its visit to Italy in November 2022.

The Opinion has been published together with the comments in English and Italian from the authorities. A summary of the Fifth Opinion is also available in Italian.

The Framework Convention for the Protection of National Minorities and Italy

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The Framework Convention for the Protection of National Minorities is Europe's most comprehensive treaty protecting the rights of persons belonging to national minorities. It is the first legally binding multilateral instrument devoted to the protection of national minorities worldwide, and its implementation is monitored by an Advisory Committee composed of independent experts. The treaty entered into force on 1 February 1998 and is now in force in 39 states.


MINORITÉS NATIONALES ET LANGUES RÉGIONALES OU MINORITAIRES
25 ANS D'ENGAGEMENT EN FAVEUR DE LA DIVERSITÉ