Discours du président Charles Michel lors du sommet de la CELAC à Buenos Aires (Argentine) VIDEO

Conseil de l'Union Européenne - 20/07/2023 10:40:00

Sommet de la CELAC à Buenos Aires (Argentine) des 17 et 18 juillet 2023

C'est pour moi un grand plaisir et aussi un grand honneur d'avoir l'occasion de m'exprimer à l'occasion de ce septième sommet de la CELAC au nom de l'Union européenne. Et je souhaiterais commencer par remercier très chaleureusement le président Fernández et l'Argentine pour cette invitation qui nous est donnée et les féliciter pour la présidence pro tempore de la CELAC, et j'adresse tous mes voeux de succès à la prochaine présidence pre tempore de la CELAC, naturellement. J'avais également eu l'occasion d'être invité à votre dernier sommet, qui s'était tenu au Mexique. Je vais profiter de l'occasion de cette prise de parole pour adresser les amitiés chaleureuses de quelqu'un qui connaît bien votre région et qui est, je pense, très ami avec beaucoup d'entre vous, c'est le haut représentant Josep Borrell.

Par ailleurs, c'est pour nous un grand plaisir de revoir à cette table le Brésil, qui participe à la CELAC. Le Brésil est de retour et nous souhaitons nous en réjouir. Félicitations à l'Argentine pour le travail qui a été mené. Félicitations à l'Argentine aussi pour votre récente victoire à la Coupe du monde contre la France. Et je sais à quel point le football est une passion importante dans cette partie du monde, c'est également une passion importante en Europe. C'est une passion partagée qui relie nos deux continents et rapproche nos peuples. En fait, je ne sais pas si vous le savez, mais l'Amérique du Sud et l'Europe, ensemble, ont remporté absolument toutes les Coupes du monde depuis qu'il y a des Coupes du monde dans l'histoire du football, et parce que, très cher président, je souhaite être un invité respectueux et poli, je ne mentionnerai pas qui, de l'Europe ou de l'Amérique du Sud, a gagné le plus de Coupes du monde dans l'histoire.

Très chers amis, le football nous rassemble mais, bien sûr, il y a beaucoup d'autres choses qui nous unissent et qui nous rassemblent. Nous partageons une histoire, des racines, nous partageons des valeurs. Nos continents abritent les plus grandes démocraties du monde et, ensemble, nous nous tenons debout lorsque la démocratie et les droits de l'homme sont attaqués, comme nous l'avons fait il y a quelques jours, ce mois-ci, au Brésil, à l'occasion de cette tentative de déstabilisation et de coup d'État. Ensemble, nous défendrons toujours la volonté du peuple en soutenant l'État de droit et des institutions démocratiques.

Et nous partageons un attachement à la justice sociale, au droit à la santé, au droit à l'éducation, à l'égalité entre les femmes et les hommes ou au droit à une pension décente, par exemple.

Nous sommes aussi unis pour rassembler nos forces pour protéger notre planète et pour exploiter le pouvoir des nouvelles technologies et de la numérisation, pour améliorer les conditions de vie de nos citoyens. Parce que nous sommes convaincus avec vous que les transitions numérique et climatique doivent être équitables pour chacun.

Enfin, nous mesurons bien que nous ne pouvons pas le faire seuls. Nous partageons donc un attachement profond pour un ordre multilatéral fondé sur des règles et fondé sur des principes, dont la charte des Nations unies, fondée sur la coopération et le dialogue. Parce que c'est la meilleure façon de faire face à nos différences et de résoudre ensemble les défis mondiaux.

Mesdames et Messieurs, nous croyons également à l'intégrité territoriale et à la souveraineté de chaque nation. Nous pensons que, à notre époque, il n'est pas acceptable qu'il y ait des tentations ou des tentatives de changer par la force des frontières internationalement reconnues. Et c'est pourquoi la plupart d'entre nous avons condamné la guerre illégale de la Russie contre l'Ukraine, parce que cette guerre menace l'ordre international et met en difficulté et en danger le principe selon lequel chaque pays a le droit de décider de son propre avenir. Si un pays, par ailleurs membre permanent du Conseil de sécurité et détenteur de l'arme nucléaire, peut envahir son voisin, tuer un peuple, détruire les villes sans conséquences, alors tous, collectivement, nous sommes plus fragiles, nous sommes moins en sécurité.

Cette guerre a évidemment un impact puisque cela a aggravé l'insécurité alimentaire et cela a accru les inégalités sociales. L'Union européenne est déterminée à agir pour faire face aux terribles conséquences de cette guerre en Europe et dans le reste du monde. Par exemple, nous avons mis en place des voies d'exportation, les voies de solidarité, pour tenter de relever ce défi de la sécurité alimentaire. Nous soutenons également les efforts des Nations unies pour permettre l'exportation, au travers de la mer Noire, de millions de tonnes de denrées alimentaires. Et nous souhaitons soutenir l'initiative pour une formule de paix présentée par le président Zelensky.

Mesdames et Messieurs, en ces temps agités changement climatique, transformation numérique, crise de la COVID-19 qui nous a mis sous pression, tensions géopolitiques nous pensons que, plus que jamais, l'Amérique latine et les Caraïbes, avec l'Europe, avons besoin les uns des autres. Nous pouvons nous entraider et nous soutenir mutuellement. Nous devons préserver notre autonomie, suivre nos propres chemins en tant que nations démocratiques, et c'est la raison pour laquelle nous sommes extrêmement motivés par ce sommet entre l'Amérique latine et les Caraïbes et l'Union européenne qui pourrait avoir lieu, c'est l'invitation qui est lancée au mois de juillet à Bruxelles. Nous sommes impatients de travailler main dans la main avec la CELAC pour faire de ce sommet un succès et pour renforcer notre partenariat birégional.

Mesdames et Messieurs, une idée est essentielle. Nous ne devons pas seulement être de bons partenaires parce que nous parlons les mêmes langues, parce que nous partageons les mêmes valeurs, parce que nous lisons les mêmes livres et parce que nous partageons la même passion pour le football. Cela, c'est le partenariat du coeur et c'est important. Mais il y a plus que cela, il y a aussi la raison. Notre partenariat est aussi fondé sur l'intérêt mutuel et le respect mutuel. Dans un contexte mondial difficile, travailler ensemble sera bénéfique des deux côtés de l'Atlantique et personne ne le sait mieux que nos entreprises européennes et latino-américaines.

L'Union européenne est l'investisseur le plus important dans la région de la CELAC, et les entreprises et les investissements de la CELAC en Europe augmentent de manière rapide. L'Union européenne est votre troisième partenaire commercial. Vous êtes notre sixième partenaire commercial. Ensemble, nous avons l'un des réseaux les plus solides d'accords commerciaux, politiques et d'association au monde et nous travaillons pour le rendre encore plus robuste. Par exemple, nous avons récemment modernisé l'accord d'association Union européenne-Chili, ou encore nous voulons faire progresser la modernisation de l'accord Union européenne-Mexique et nous souhaitons finaliser l'accord Union européenne-Mercosur. Il est temps de réveiller cet accord et d'amener cet accord dans la dernière ligne droite afin de pouvoir le conclure. Pour que ses objectifs soient couronnés de succès, nous devons combiner commerce, investissement avec des normes ambitieuses en matière d'environnement, de travail et de société. Et je crois vraiment que 2023 peut être et doit être une année clé pour nous amener à progresser sur ce sujet.

Dans la perspective de notre sommet, nous pouvons aussi travailler pour libérer tout le potentiel du programme d'investissement de l'Union européenne, ces nouveaux investissements dans des projets mutuellement bénéfiques pour faire progresser les transitions climatique et numérique. Nous souhaitons mettre en marche ces projets, dont la stratégie numérique avec des projets phares, pour veiller à numériser nos économies, à les verdir également. Il faut prendre en considération cette réalité du changement climatique, sans jamais oublier que les citoyens sont au centre de nos ambitions.

Quelques exemples: vous avez les plus grandes réserves de lithium sur Terre et vous avez une industrie automobile forte. L'Union européenne peut soutenir et construire avec vous des chaînes de valeur pour produire la voiture électrique du futur, pour produire des bus électriques, qui sont utiles pour réduire les émissions de carbone dans nos villes. Avec plusieurs d'entre vous, j'ai eu l'occasion de parler de l'hydrogène vert, vous avez de l'eau, vous avez une grande part d'énergies renouvelables dans votre mix énergétique. Nous pouvons développer ces chaînes de valeur avec vous, nous pouvons aussi soutenir vos efforts pour tenter de briser la fracture numérique entre les riches et les pauvres de la société. Nous pouvons être un partenaire pour améliorer la connectivité numérique et électrique, par exemple dans les zones rurales et éloignées. Le potentiel de coopération en ce qui concerne les énergies renouvelables, les réseaux 5G, les transports, l'assainissement et la finance durable est gigantesque. La santé est également un gisement pour une coopération renforcée.

Mesdames et Messieurs, je conclus. Un océan nous sépare, c'est vrai, on a peut-être l'air éloignés d'un point de vue géographique, mais, à bien des égards, nous sommes extrêmement proches. Nous sommes proches dans nos coeurs, nous sommes proches dans nos têtes et nous avons le potentiel pour renforcer ce partenariat et pour relever de nombreux défis. Je pense qu'à la clé, il y a deux conditions qui sont essentielles, c'est la confiance et le respect. Et l'Union européenne sent cet esprit de confiance et de respect mutuel, nous sommes prêts à unir nos forces pour coopérer avec vous.

Et je souhaiterais terminer ce message en citant un célèbre écrivain, Julio Cortázar, grand écrivain franco-argentin né à Bruxelles, qui disait "Nous avons marché sans nous chercher, mais en sachant que nous marchions pour nous trouver". "Andábamos sin buscarnos, pero sabiendo que andábamos para encontrarnos".

Je suis très impatient de vous retrouver à Bruxelles, j'essaierai d'améliorer mon espagnol en prévision de ce sommet. Vous pouvez compter sur l'Union européenne. Merci pour votre chaleureux accueil. Merci à vous.