Le géant allemand de l'énergie RWE fait démonter des éoliennes pour agrandir une mine de charbon devenu la priorité

Novethic - 11/09/2023 17:35:00



une éolienne


En Allemagne, le géant RWE est en train de démonter des éoliennes pour agrandir une mine à ciel ouvert de charbon, le tout avec le feu vert du gouvernement. Avec la guerre en Ukraine et les coupures de gaz russe, le pays a relancé des projets de charbon, bien que ce soit la plus polluante des énergies fossiles.

Après avoir fait raser le village de Lützerath, devenu un temps le point de ralliement des écologistes du monde entier, RWE s'attaque désormais à un parc éolien. L'énergéticien allemand a en effet commencé à démonter des éoliennes, toujours dans l'optique d'étendre sa mine de charbon à ciel ouvert Garzweiler, située en Rhénanie, dans l'ouest du pays. "Le fait que des éoliennes soient démolies pour agrandir une mine de charbon à ciel ouvert en pleine crise climatique et énergétique ne peut être surpassé en termes d'absurdité", a réagi l'initiative locale d'opposants "All Villages Remain" citée par Der Spiegel.

L'extension de cette mine, l'une des plus grandes d'Europe, qui produit du lignite, l'un des charbons les plus polluants, prévue depuis 1995 a été relancée à l'automne dernier quand RWE et le gouvernement allemand ont signé un accord polémique. L'énergéticien a obtenu le feu vert définitif pour exploiter le sous-sol de Lützerath et pour raser donc le village et ses alentours, comprenant le champ d'éoliennes. En échange de quoi, il s'est engagé à sortir du charbon plus tôt que prévu dans le bassin minier rhénan, en 2030 au lieu de 2038.

"Un péché vis-à-vis de la politique climatique"
Pour le gouvernement allemand, il s'agit ainsi de "sécuriser" l'approvisionnement énergétique du pays, après les coupures de gaz russe liées à la guerre en Ukraine. Il s'agit aussi de combler la fermeture des dernières centrales nucléaires au printemps dernier et d'avoir un back-up au cas où les objectifs de production d'énergie renouvelable, particulièrement ambitieux du pays, ne soient pas atteints. L'Allemagne vise en effet à tripler la production éolienne et quadrupler la production solaire d'ici à 2030. Or, on constate un léger ralentissement ces dernières années avec une contestation qui commence à émerger sur les éoliennes terrestres.

RWE se targue en outre de laisser sous terre 280 millions de tonnes de lignite avec la fin anticipée du charbon. Mais c'est sans tenir compte du fait que deux centrales électriques au lignite, chacune d'une capacité de 600 mégawatts, vont rester en activité jusqu'en 2024, alors qu'elles devaient s'arrêter de fonctionner à la fin de 2022. "Bien sûr que c'est un péché vis-à-vis de la politique climatique, et que nous devrions travailler à ce que cela dure le moins de temps possible", s'est justifié le ministre écologiste de l'Économie, Robert Habeck, qui admet un choix difficile mais "nécessaire".

Record de consommation mondiale de charbon
De ce côté-ci du Rhin, la France a également autorisé fin août les deux dernières centrales à charbon à fonctionner plus longtemps, afin d'éviter des coupures hivernales. Pour ce faire, les plafonds d'émissions de gaz à effet de serre ont été assouplis de manière temporaire. "L'hiver prochain, nous anticipons un niveau de tension moindre par rapport à l'année dernière, mais par précaution, nous prenons toutes les mesures qui assureront la production électrique française", a indiqué le ministère de la Transition écologique. Emmanuel Macron s'était pourtant engagé à fermer toutes les centrales au charbon d'ici la fin de son premier quinquennat, mais la guerre en Ukraine a rebattu les cartes.

Au niveau mondial, malgré l'essor des renouvelables, le charbon continue de battre des records. L'année 2023, qui s'apprête vraisemblablement à être la plus chaude, devrait aussi établir un nouveau record mondial de consommation de charbon. En 2022, celle-ci avait déjà augmenté de 3,3%, un niveau inédit. En outre, entre 2015 et 2022, les émissions de carbone liées au charbon par habitant au sein des pays du G20 ont augmenté de 9%, selon un rapport du think tank Ember. De quoi justifier la nouvelle sortie du patron de l'Onu, Antonio Guterres, qui assure que "l'effondrement climatique a commencé".
Source: Concepcion Alvarez Novethic