Etude sur le harcèlement sexiste et les violences sexuelles faites aux femmes dans les transports publics

FNAUT - Fédération Nationale des Associations d'Usagers des Transports - 16/06/2016 17:10:00

Le harcèlement est un problème de société transversal : il est subi au travail, en milieu scolaire, en ligne, dans les espaces publics, etc. Un an après l'avis rendu par le Haut Conseil à l'Egalité entre les femmes et les hommes (HCEfh), qui établissait que 100% des femmes avaient déjà été victimes de harcèlement dans les transports en commun, la FNAUT s'est intéressée à ce problème.


Pour la FNAUT, association de défense des usagers des transports, le harcèlement constitue une entrave réelle à la mobilité et à l'accès aux services de transports publics, sachant qu'une majorité des utilisateurs des transports publics sont des femmes.

La FNAUT a mené une étude sur le harcèlement dans les transports publics, pilotée par Christiane Dupart, membre du Bureau de la FNAUT.

Dans le cadre de l'étude, nous avons diffusé un questionnaire qui a recueilli plus de 6200 réponses et qui a permis la collecte de données factuelles sur ce problème. L'étude consiste en l'analyse des résultats de l'enquête, la présentation d'un état du droit et des actions publiques sur la question ainsi que la présentation de solutions pour lutter contre le harcèlement.

Résultats du questionnaire (synthèse)

Notre enquête ne constitue pas un sondage représentatif mais la réponse volontaire à un questionnaire. Elle confirme, s'il en était besoin, l'ampleur du harcèlement sexiste. On constate qu'une très large majorité des répondantes affirment avoir déjà été victimes de harcèlement dans les transports.


L'absence de réaction des témoins aggrave le phénomène et le ressenti des victimes.


Seulement 19% des enquêtées déclarent que leur utilisation des transports n'est pas influencée par le phénomène du harcèlement. A contrario, 48% adaptent leur tenue vestimentaire, 54% évitent de se déplacer en transports publics à certaines heures et 34% recourent à l'utilisation d'autres moyens de transport tels que le vélo, le taxi ou le véhicule personnel (un certain nombre de répondantes adoptant plusieurs de ces conduites).

Sans surprise, 95% des répondantes victimes de harcèlement l'ont subi de la part d'un homme. Pour 55% des femmes harcelées, il s'agissait d'un groupe d'hommes. On peut souligner qu'il n'y a pas de « moment » précis pour être harcelée, ce problème existe à tout heure.

Les comportements subis par les victimes de harcèlement sont majoritairement :

- injure et/ou menace : 36%,
- harcèlement sexuel : 41%,
- agression sexuelle : 40% (sachant qu'une enquêtée peut avoir subi plusieurs comportements).

Tous ces actes constituent des infractions et sont pénalement répréhensibles. Pourtant, le pourcentage de répondantes victimes de harcèlement ayant portées plainte est insignifiant.

Contexte juridique

La catégorisation des actes de harcèlement et de violences étudiés par la FNAUT correspond à ceux de l'avis du HCEfm 2015. Le harcèlement sexiste regroupe :

- les sifflements, les commentaires sur le physique/le comportement, la tenue vestimentaire, les présences envahissantes et opprimantes...,
- les injures et les menaces.

Viennent ensuite les violences sexuelles :

- l'exhibition,
- le harcèlement sexuel (avances, gestes à connotation sexuelle...),
- l'agression sexuelle,
- le viol.

A l'exception de la première catégorie de harcèlement sexiste, tous ces actes sont des délits ou
des crimes.

Solutions recommandées par la FNAUT

Il existe une pluralité de solutions pour lutter contre le harcèlement qui concernent l'ensemble de la société et pas seulement les transports publics. L'étude comporte un volet sur les transports publics réservés aux femmes ainsi que de nombreuses pistes de solutions. Les solutions retenues par la FNAUT sont les suivantes :

- L'éducation sur la question du harcèlement et du sexisme est absolument nécessaire. Cette éducation, réclamée par les répondantes, vise spécifiquement les harceleurs potentiels. Elle décharge les victimes, les témoins et les transporteurs de leur « rôle » dans la lutte contre le harcèlement. Elle peut passer par des formations dans les écoles,les universités, les entreprises, etc. Elle peut également prendre la forme de « campagnes de sensibilisation dans les lieux publics et les transports ».
- La réappropriation de l'espace public par les femmes doit être favorisée afin de mieux adapter les transports à leurs besoins.

* Cette réappropriation nécessite la mise en place d'une co-élaboration (usager.ère.s et Pouvoirs publics) des transports. Les marches exploratoires et les comités d'usager.ère.s sont de bons outils, qui permettent une amélioration des infrastructures actuelles et l'exercice d'une influence sur les décisions
d'aménagement.
* L'intégration de la question du genre doit être systématique dans les politiques publiques et les dispositifs d'analyse de ces dernières. En particulier, les politiques de sécurité publique doivent mieux prendre en compte le harcèlement.

- La formation des personnels des entreprises de transport doit prendre en compte le harcèlement et rappeler leur rôle pour lutter contre celui-ci (prévention, réaction, accompagnement des victimes). La présence des agents est ressentie comme un élément important de prévention et d'assistance.
- La simplification des plaintes et la fourniture d'espaces de témoignages doivent être mises en oeuvre. Seulement 2% des victimes ayant répondu à notre enquête ont porté plainte, alors que, dans plus de 71%% des cas, les actes subis constituaient des infractions pénales.
- Des conseils pour réagir face à une situation de harcèlement doivent être diffusés à l'attention des victimes ou témoins potentiels. L'enquête démontre bien la nécessité de telles informations puisque de nombreuses personnes, victimes ou témoins, n'ont pas du tout su comment réagir.
- La création de lignes ou d'arrêts à la demande doit être développée. Elle permet ,d'éviter les trop longs déplacements à pied à certaines heures.

La lutte contre le harcèlement doit être une priorité des transports publics, leur utilisation étant directement affectée par ce phénomène. Les femmes, comme tous les usagers des transports, ont droit à leur mobilité.