"Ernest Pignon-Ernest" Exposition au MAMAC

Métropole Nice Côte d'Azur - 17/10/2016 10:45:00


Du plateau d'Albion à Certaldo, de Charleville à Paris, de Naples à Alger, de Nice à Soweto, du Chili à la Palestine, depuis 1966, Ernest Pignon-Ernest change les rues du monde en oeuvre d'art éphémère. Il a ainsi préfiguré nombre d'expériences artistiques qui sollicitent l'espace public. Considéré comme le précurseur de l'art urbain, il est aujourd'hui une figure incontournable et populaire de la scène artistique. Unique par sa tenue éthique et esthétique, son parcours quelque soit les thèmes abordés, a réussi le rare prodige de concilier un engagement sans concession ni reniement avec une expression artistique d'une extrême exigence, au point que certaines de ses images, notamment les fusillés de la Commune, ou son Rimbaud vagabond reproduit à des milliers d'exemplaires, sont devenues de véritables icônes des temps modernes.

Ses interventions métamorphosent, perturbent, révèlent les lieux et les évènements qu'il a précédemment choisis. Inscrits de nuit dans les contextes pour lesquels ils ont été conçus, ses dessins - essentiellement représentation humaine grandeur nature - s'apparentent à des fictions surgissant par effraction dans le champ du réel et en bouleversent autant la symbolique que les perspectives.
« . au début il y a un lieu, un lieu de vie sur lequel je souhaite travailler. J'essaie d'en comprendre, d'en saisir à la fois tout ce qui se voit : l'espace, la lumière, les couleurs et dans le même mouvement tout ce qui ne se voit pas, ne se voit plus : l'histoire, les souvenirs enfouis, la charge symbolique. Dans ce lieu réel saisi ainsi dans sa complexité, je viens inscrire un élément de fiction, une image (le plus souvent un corps à échelle 1. Cette insertion vise à la fois à faire du lieu un espace plastique et à en travailler la mémoire, en révéler, perturber, exacerber la symbolique. »
E.P-E, entretien avec André Velter, 2014.

Inscrites ainsi dans les lieux, les évènements qui leur donnent tout leur sens, ces images sont livrées au caprice du temps jusqu'à disparaître. Ne restent que les croquis, les esquisses préparatoires, les dessins matrices des sérigraphies et les photographies in situ que réalise l'artiste. Pensée par Ernest Pignon-Ernest, l'exposition du MAMAC, bâtie sur ces centaines de documents et d'oeuvres propose la découverte d'un processus de travail, l'exposé d'une démarche novatrice, retrace l'ensemble d'un parcours d'exception, sensible, sensuel, alerté, d'une création qui exalte la mémoire, les mythes, la poésie, les révoltes, les personnalités hors norme, toujours en prise sur le qui-vive. Ernest Pignon-Ernest investit l'architecture baroque de l'église abbatiale de Saint-Pons surplombant le Centre Hospitalier Universitaire Pasteur avec la présentation de la série "EXTASES".

Les feuilles de papier grand format aux courbes et contre-courbes reçoivent les portraits de grandes mystiques chrétiennes et semblent léviter au-dessus d'un miroir d'eau aux reflets vertigineux.
L'artiste fait apparaître au coeur de l'église des femmes jugées folles ou hystériques habitées par un amour de Dieu éminemment charnel troublé par un ardent désir de transcendance et de désincarnation. Ces dessins, portraits imaginés, ont été élaborés à partir des écrits de ces mystiques, on peut repérer des références au Bernin, Caravage, Sodoma, Gérard de Nerval, Pierre-Jean Jouve, Jean-Noël Vuarnet, Claude Louis-Combet, André Velter. L'ensemble est le fruit de centaines de dessins préparatoires réalisés sur plusieurs années avec pour modèle Bernice Coppieters, danseuse-étoile des Ballets de Monte-Carlo. Ces mystiques aux passions et tensions contraires, dramatiques et exubérantes, trouvent leur paroxysme dans cette architecture baroque.

ERNEST PIGNON-ERNEST ET LE MAMAC
En 1995, sur l'invitation de Gilbert Perlein assisté de Jacqueline Péglion, Ernest Pignon-Ernest revient sur son travail sur Naples dans une exposition monographique au 1er étage du MAMAC de Nice intitulée Sudari di carta (24 novembre 1995 - 10 mars 1996).
Suite à l'exposition, le dessin préparatoire de David et Goliath (d'après Caravage) réunissant les têtes tranchées de Caravage et Pasolini [1988] entre dans les collections du musée. L'artiste fait alors don d'une série de photographies des dessins en situation dans les rues de Naples. En 1998, l'artiste renouvelle sa générosité et son attachement au MAMAC par le don de 20 dessins préparatoires de Naples. Ce fonds est ensuite complété par la généreuse donation du Docteur Nahoul en 2010 qui comprend une soixantaine d'oeuvres dont une dizaine d'Ernest Pignon-Ernest. Aujourd'hui, le MAMAC possède une quarantaine d'oeuvres de l'artiste.
Parallèlement à ce lien prégnant, en 2004, dans le cadre de l'événement « Les murs : un autre regard » proposé en parallèle de l'exposition Intra-muros au MAMAC en 2004, Ernest Pignon-Ernest propose l'intervention Cadres et Cadrages qui consiste à apposer non pas une image mais un cadre de papier blanc sur des morceaux choisis des murs de la cité attirant le regard du passant à voir autrement.

Ernest Pignon-Ernest
25 juin 2016 - 8 janvier 2017
MAMAC - 1er étage du musée
Place Yves Klein
06364 Nice cedex 4