Le charbon vert du Tchadien David Ngaba fait sensation au concours de Création pour le développement durable des 8èmes Jeux de la francophonie d'Abidjan

CIJF - Comité International des Jeux de la Francophonie - 28/07/2017 12:18:40

C'est une simple briquette faite de déchets biodégradables séchés et de gomme arabique qui a permis au Tchadien David Ngaba, 32 ans, de décrocher la médaille de bronze au 8ème Jeux de la Francophonie d'Abidjan dans le concours de Création pour le développement durable. Une briquette qu'il appelle le « charbon vert » et qui pourrait bien révolutionner l'avenir de notre consommation d'énergie. La concurrence était rude, le niveau selon lui « extrêmement élevé » et les initiatives des autres jeunes francophones originales, telles le réfrigérateur québécois sans électricité et en argile, ou l'application pour smartphones gabonaise Supercane qui vérifie en temps réel les risques d'inondations des canaux d'évacuation d'eaux usées.

Lorsqu'il s'avance sur la scène de l'Institut français d'Abidjan pour présenter son projet, David en impose dans sa « tenue des chefs », celle du Sultan du Ouaddaï, l'une des 23 provinces du Tchad. Sa voix douce et posée contraste avec sa carrure etcapte immédiatement l'attention du public. « La Terre n'a pas de problème. Le problème, c'est nous. Qui est le plus dangereux, le déchet ou celui qui les crée ? », demande-t-il à l'assistance.

Il faut dire que David Ngaba a été sensibilisé très tôt aux problèmes environnementaux et maîtrise son sujet. Son père était professeur de sciences environnementales à Hambourg et fondateur du CREFELD, le Centre Régional d'Etude et de Formation Environnementales de Lutte contre la Désertification au Tchad. « C'est lui qui m'a transmis la fibre de l'écologie » assure le jeune homme qui suit ses traces en obtenant une maîtrise en sciences naturelles. Il travaille ensuite deux ans dans une compagnie pétrolière avant de créer son propre bureau d'études (Morgan Energy) spécialisé dans les questions de développement durable.

Du charbon fait à partir de déchets biodégradables aux multiples possibilités

L'idée du charbon vert lui vient en discutant avec un ami, lui qui vient « d'un coin perdu du monde qui n'apporte pas grand-chose à l'économie mondiale » mais qui veut changer les choses, justement. Il comprend qu'on peut fabriquer du charbon à partir de débris de végétaux, pousse la technique plus loin en utilisant tous les déchets biodégradables, présents en abondance ; se contenter des débris de végétaux ne suffit pas, « à la longue les gens allaient encore se retrouver à couper du bois ».

Il fait sécher ces déchets naturels qui une fois brûlés ont l'avantage de ne pas produire de fumées nocive par rapport au charbon classique. Il obtient de la poudre de charbon, char, « carbone pur à 99,99% ». La gomme arabique utilisée comme liant permet d'obtenir une briquette qui ressemble comme deux gouttes d'eau au charbon de bois. Les avantages du charbon vert sont nombreux : un impact positif pour la santé tout d'abord, une lutte contre la prolifération des décharges sauvages mais aussi contre la déforestation. Les cendres deviennent un engrais pour enrichir les sols appauvris par les engrais chimiques et la fumée de carbone est utilisée comme pesticide dans les champs.

Le charbon vert, possible vecteur d'emplois

« Le développement durable, c'est jouir de ce que la nature met à notre disposition sans la détruire », résume David. Mais il voit plus loin. Le développement durable, c'est aussi pour lui le développement des ressources humaines. Collecter les déchets, les faire sécher, les carboniser puis vendre les briquettes implique de recruter de la main d'oeuvre. « A travers le charbon vert je donne de l'emploi qui permet à une jeunesse de se sociabiliser. N'est-ce pas aussi ça le développement durable ? » questionne-t-il, malicieux. Il souhaite à long terme passer du stade artisanal à l'industriel et vivre de ce métier en donnant du travail aux autres.

Quand il quitte la scène sous les ovations du public après la présentation du charbon vert, David ne s'imagine pas remporter la médaille de bronze pour son projet. Il se sent « chanceux pour son pays » mais promet de ne pas « s'endormir sur sa médaille » quand il voit que les jeunes présents au Jeux de la Francophonie, où il a été très bien accueilli, fourmillent d'idées pour protéger notre environnement. Pour lui, l'atmosphère de Jeux reflète les valeurs de la francophonie : « l'amitié, le respect, l'amour du travail bien fait et la culture du résultat ».

Cet entrepreneur agricole a une vie partagée entre le bénévolat (sa mère, enseignante est devenue humanitaire) et la musique qu'il adore. Il joue de la rumba et de la musique traditionnelle avec ses quatre frères. Du baume au coeur dans un pays qui vit « des moments délicats à cause de la crise économique ».« Les Tchadiens se battent, refusent la fatalité. Mais aujourd'hui dans cette situation de crise, je me retrouve à Abidjan défendre les couleurs de mon pays et remporter une médaille de bronze. Nous on a n'a pas de Zidane ou de grands hommes pour nous représenter : quand un Tchadien se mobilise c'est tout le pays qui le soutient ».


Photo : David Ngaba pose avec sa médaille de bronze devant son stand à l'Institut français d'Abidjan

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