Indépendance du pouvoir judiciaire: la Commission européenne passe à la deuxième étape de la procédure d'infraction contre la Pologne

Commission Européenne - 13/09/2017 10:05:00

La Commission européenne a décidé aujourd'hui d'envoyer un avis motivé à la Pologne au sujet de la loi polonaise sur l'organisation des juridictions de droit commun.

La Commission a procédé à une analyse approfondie de la réponse des autorités polonaises à la lettre de mise en demeure de juillet 2017 concernant la loi sur l'organisation des juridictions de droit commun.

La Commission européenne maintient que la loi polonaise en cause est incompatible avec le droit de l'Union car, en introduisant un âge de départ à la retraite des juges différent pour les femmes (60 ans) et les hommes (65 ans), elle comporte des éléments discriminatoires à l'encontre des personnes sur la base du sexe. Une telle situation est contraire à l'article 157 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne (TFUE) et à la directive 2006/54 sur l'égalité de traitement entre hommes et femmes en matière d'emploi et de travail.

La Commission s'inquiète également, sur le plan juridique, de ce qu'en conférant au ministre de la justice le pouvoir discrétionnaire de prolonger le mandat des juges ayant atteint l'âge de départ à la retraite et de licencier ou nommer des présidents de juridictions, la loi fasse vaciller l'indépendance des juridictions polonaises, en violation des dispositions combinées de l'article 19, paragraphe 1, du traité sur l'Union européenne (TUE) et de l'article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne. Les nouvelles dispositions permettent au ministre de la justice d'exercer son influence sur les juges, à titre individuel, à cause notamment des critères flous qui entourent le renouvellement de leurs mandats et de l'absence de date limite pour la prise d'une décision au sujet dudit renouvellement, ce qui sape le principe de l'inamovibilité des juges. De même, le pouvoir discrétionnaire de renvoyer et de nommer des présidents de cours et tribunaux permet au ministre de la justice d'influer sur ces juges lorsqu'ils statuent dans des affaires portant sur l'application du droit de l'Union.

Aussi la Commission est-elle passée à la phase suivante de la procédure d'infraction. Les autorités polonaises disposent désormais d'un mois pour prendre les mesures qui s'imposent pour se conformer au présent avis motivé. À défaut, la Commission pourrait décider de saisir la Cour de justice de l'Union européenne.

Historique du dossier

Le 26 juillet 2017, le collège des commissaires a décidé de lancer la présente procédure d'infraction dès l'entrée en vigueur de la loi sur l'organisation des juridictions de droit commun, laquelle avait déjà été adoptée par le parlement polonais et était en attente de sa publication au Journal officiel polonais. La Commission européenne a ensuite adressé aux autorités polonaises une lettre de mise en demeure, après l'entrée en vigueur de la loi le 28 juillet, exposant clairement les préoccupations qu'elle nourrissait du point de vue juridique. Les autorités polonaises ont répondu à cette lettre de mise en demeure le 31 août 2017.

L'infraction en question n'affecte pas le dialogue en cours avec la Pologne au sujet de l'état de droit, lancé par la Commission en janvier 2016. La Commission a publié une (troisième) recommandation complémentaire sur l'état de droit le 26 juillet 2017, qui portait notamment sur la loi sur l'organisation des juridictions de droit commun. Le premier vice-président de la Commission M. Timmermans tiendra informé, au nom de celle-ci, le Conseil des affaires générales, qui se tiendra le 25 septembre, au sujet de l'état actuel de la situation en ce qui concerne le dialogue relatif à l'état de droit. L'état de droit est l'une des valeurs communes sur lesquelles est fondée l'Union européenne; il est inscrit à l'article 2 du traité sur l'Union européenne. La Commission européenne, conjointement avec le Parlement européen et le Conseil, est chargée en vertu des traités de garantir le respect de l'état de droit en tant que valeur fondamentale de l'Union et de veiller au respect du droit, des valeurs et des principes de l'Union.
12 septembre 2017